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Les médias américains ont trouvé une bonne façon de promouvoir la guerre : inviter des « analystes » liés à la défense.

L’ancien secrétaire américain à la Défense, Leon Panetta, est un habitué du réseau CNN, où il est apparu à au moins quatre reprises ces derniers temps, chaque fois pour donner son point de vue sur l’invasion russe de l’Ukraine. Le 8 avril, Panetta n’a pas manqué de mentionner au passage que les États-Unis devaient « fournir toutes les armes nécessaires aux Ukrainiens afin qu’ils puissent riposter, et riposter maintenant ».

Problème de taille : Panetta est aujourd’hui conseiller principal chez Beacon Global Strategies, une société active dans l’industrie de la défense, qui, entre autres, représente les intérêts du fabricant d’armes Raytheon. Ce fait n’a jamais été divulgué aux téléspectateurs.

Propagande? Absolument. Depuis le début de la guerre en Ukraine, les réseaux américains d’information font régulièrement appel à ce type d’analystes passés maîtres dans l’art de dissimuler leur conflit d’intérêts. Ce n’est plus un secret de polichinelle : les médias américains font pression sur l’administration Biden pour qu’elle déclare la guerre à la Russie. D’où l’embauche d’« analystes » pour convaincre un peu tout le monde de la nécessité de la guerre.

Et à ce titre, Beacon Global Strategies, l’employeur de Leon Panetta, a le vent dans les voiles : Jeremy Bash, son fondateur et directeur général, est un invité récurrent chez MSNBC et NBC. Puis un autre habitué de MSNBC, l’amiral James Stavridis, est membre du conseil consultatif de Beacon Global Strategies. En parallèle, Stavridis est vice-président des affaires mondiales et directeur général du géant du capital-investissement Carlyle Group, lequel investit depuis longtemps dans les marchés de la défense et de la sécurité nationale. Mais pas un mot aux téléspectateurs, s’il vous plaît.

Durant l’une de ses apparitions, Stavridis a d’ailleurs pris soin de recommander que les États-Unis expédient des missiles antiaériens en Ukraine pour permettre à ce pays de créer sa propre zone d’exclusion aérienne. Coïncidence qui n’en est pas une : l’un des clients de Beacon Global Strategies, la firme Raytheon, fabrique précisément des missiles antiaériens.

MSNBC, pour parler encore de lui, a également invité l’ex-secrétaire à la Sécurité intérieure Jeh Johnson en omettant de spécifier qu’il siégeait au conseil d’administration de Lockheed Martin, l’un des plus gros constructeurs dans l’industrie de la défense.

L’ancien directeur de la CIA et général de l’armée à la retraite, David Petraeus, a quant à lui effectué quelques apparitions sur CNN. Ce que les téléspectateurs n’ont jamais su par contre, c’est qu’il travaille également pour KKR, une entreprise qui exerce des activités dans l’industrie de la défense. L’homme siège également au conseil d’administration d’Optiv, une société qui fournit des technologies et des services de cybersécurité à l’ensemble du gouvernement américain, dont le ministère de la Défense.

MichèIe Flournoy, ancienne sous-secrétaire américaine à la Défense sous Obama, est également apparue à CNN au moins deux fois ces dernières semaines pour plaider en faveur d’un soutien militaire accru à l’Ukraine. Flourney est une associée chez WestExec Advisors, dont les clients comprennent des entreprises de l’aérospatiale et de la défense, telles que Boeing.

Ce phénomène de portes tournantes n’est pas nouveau; il s’était notamment produit lors de l’invasion illégale de l’Irak par les États-Unis en 2003. L’organisme Fairness & Accuracy In Reporting (FAIR) a démontré, après avoir évalué trois semaines de couverture médiatique qui ont suivi le retrait des troupes américaines de l’Afghanistan l’an dernier, que 20 des 22 invités vedettes des réseaux américains le dimanche étaient liés au complexe militaro-industriel. Encore une fois, tous ont omis de révéler leur appartenance à cette industrie.


Sources

The Lever

 

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