Les talibans ont repris l’Afghanistan pour le faire revenir au Moyen-âge. Chronique d’un échec annoncé.
L’intervention du Canada en Afghanistan a coûté près de 18,5 milliards de dollars aux contribuables canadiens; 18 milliards et demi qui auront servi à entretenir les forces sur place et à prêter assistance au gouvernement afghan dans la reconstruction du pays, mais qui n’ont pu contribuer à l’éradication de l’islamisme.
Car la réalité a fait pencher la balance de l’autre côté : sept ans après le départ des dernières troupes canadiennes et à l’aube du retrait total des régiments américains, l’obscurité s’épaissit de nouveau au-dessus de l’Afghanistan avec les talibans qui viennent de se rassoir sur le trône du pouvoir qu’ils avait perdu à l’automne 2001.
Une guerre dispendieuse
De 2001 à 2014, plus de 40 000 membres des Forces canadiennes ont servi en Afghanistan; 158 en sont morts. C’est en octobre 2001, un mois à peine après les attaques du 11-Septembre, que le gouvernement libéral de l’époque décidait d’envoyer les premiers contingents canadiens en Afghanistan. Mais au sommet de l’OTAN de 2012, le premier ministre Stephen Harper annonçait qu’un nombre limité de soldats canadiens resteraient dans le pays pour aider à former et à encadrer l’armée nationale jusqu’au 12 mars 2014, date de la fin de la mission canadienne.
En plus des opérations militaires, le Canada a participé à des projets de reconstruction, consacrant 50 millions à des travaux d’irrigation, 12 millions à l’amélioration du système d’éducation à Kandahar et 60 millions à l’immunisation contre la polio, pour ne citer que ces programmes. Le jeu en valait-il la chandelle?
Les talibans reviennent au galop
La réponse : non. Dix-huit milliards pour aboutir à une impasse, on ne peut parler d’une victoire. Certes, les talibans ont été évincés, mais leur retour était écrit dans le ciel; un retour d’ailleurs facilité par le départ des dernières troupes de la coalition, dont celles des États-Unis. Et ce qui attend les Afghans ne leur est pas inconnu : ségrégation sociale et sexuelle, interdiction aux filles et aux femmes de travailler, de voter et de s’éduquer, mises à mort pour des futilités, et ainsi de suite.
Le quotidien de certaines Afghanes, qui étaient retournées à l’école ces dernières années, a déjà été transformé en profondeur. Elles sont désormais bannies des écoles et des universités dans les territoires occupés par les fanatiques de l’islam. L’une d’elles a raconté à un média que des hommes avaient tenté de l’intimider à plusieurs reprises, tirant même sur sa voiture. De quoi l’accuse-t-on? D’organiser des ateliers sur les droits des femmes, que les talibans considèrent comme une aberration.
Une autre, une jeune diplômée du secondaire, a livré un témoignage tout aussi troublant : alors que les forces talibanes prenaient petit à petit le contrôle de sa région au cours des deux dernières années, les avertissements se sont accumulés. Un jour, raconte-t-elle, des talibans ont envoyé des linceuls à son école en disant qu’ils étaient destinés aux filles qui continueraient à la fréquenter.
Selon les données de la Banque mondiale, le nombre de filles afghanes de première année scolaire a culminé en 2011 à 65 %. En 2015, ce nombre commençait à décliner pour se situer à 57 %. Aucune autre donnée n’a été rendue publique depuis, mais on sait que le déclin s’amplifie avec le retour en force des barbus de l’islam.
Pour l’ex-président afghan Hamid Karai, les pays de la coalition, dont le Canada faisait partie, ont raté une occasion en or de défaire le terrorisme en Afghanistan. Il a raison. Des milliards de dollars et des milliers de morts plus tard, ce pays pourrait prochainement retourner à l’âge de pierre, comme autrefois de 1996 à 2001.
Sources
BBC, Open Canada, The Fuller Project, Wikipedia