Les gais sont omniprésents au sein de la prélature, une réalité que ne reconnaît toujours pas le Saint-Siège.
Quand Benoît XVI s’est retiré dans ses terres, en 2013, l’événement en avait étonné plusieurs. Rares sont les papes, après tout, qui abandonnent leur siège en bonne santé. En coulisses, d’aucuns ont alors cru qu’il avait été poussé vers la porte. Chose certaine, dans ses derniers moments sur le trône papal, Benoît XVI semblait épuisé et il est possible que cet état d’esprit trouvât sa source dans une intrigue qui fut révélée au grand public l’année précédant son abdication : l’affaire « Vatileaks ».
Une hypocrisie institutionnalisée
Vatileaks avait éclaté quand le majordome du pape avait dévoilé des documents personnels de son patron à la presse italienne. Le Saint-Père avait ordonné une enquête, et un rapport de 300 pages en avait résulté, dont l’un des sujets était très épicé : le lobby gai du Vatican. Un lobby gai au Vatican? La thèse a été confirmée par Benoît XVI lui-même. Certifiant que personne n’avait fait pression sur lui pour qu’il abdique, l’ex-pape avait néanmoins tenu à préciser qu’un lobby gai composé de quatre ou cinq cléricaux avait tenté d’influencer ses décisions, mais qu’il avait réussi à le mettre en échec.
Pourquoi cette bataille contre les gais? Parce que le jugement de l’Église est sans appel : l’homosexualité est « contraire à la loi naturelle ». En conséquence, elle ne doit être approuvée sous aucun prétexte. Et Benoît XVI en avait fait l’un de ses chevaux de bataille. N’avait-il pas demandé à ceux qui vivaient une « double vie » de se retirer du clergé? Selon l’auteur Marco Politi, sous Benoît XVI, une trentaine d’hommes auraient été relevés de leurs fonctions au sein de l’Église en raison de leur orientation sexuelle. Le plus haut dans la hiérarchie à être tombé au combat est le cardinal Keith O’Brien, archevêque de St. Andrews et d’Édimbourg, accusé par des prêtres de « contacts inappropriés » s’étalant sur une période de 30 ans.
Le successeur de Benoît XVI, le pape François, a quant à lui préféré adoucir le ton : « Si une personne est gaie et qu’elle est à la recherche de Dieu […], qui suis-je pour la juger? », a-t-il une fois déclaré à des représentants de la presse. Conscient de la forte présence de gais dans son entourage, François n’a sûrement pas voulu se mettre à dos un contingent de plus en plus puissant.
Une présence forte
Quand on est l’un des collaborateurs les plus proches du pape et qu’on attire les projecteurs sur soi, on préfère que ce soit pour les bonnes raisons. Le cardinal Francesco Coccopalmerio n’a pas eu ce privilège à l’été 2017. Son secrétaire, Mgr Luigi Capozzi, avait été arrêté par les gardes suisses après avoir été surpris à organiser une orgie homosexuelle dans un bâtiment situé tout juste à côté de la basilique Saint-Pierre. Pendant un temps, Capozzi utilisait une voiture BMW immatriculée au Saint-Siège pour transporter de la cocaïne, fort utile pour ses soirées lubriques, ce qui lui évitait les interpellations par la police italienne.
Oui, les gais sont nombreux au Vatican, et plusieurs d’entre eux ne se gênent pas pour assouvir leurs besoins sexuels, malgré les vœux de chasteté qu’ils ont prononcés. Un journaliste, Carmelo Abbate, s’est fait passer pendant vingt jours pour l’ami de cœur d’un homme qui fréquente les cercles cléricaux de Rome et du Vatican. Abbate a secrètement filmé des scènes qui montrent des prêtres se livrant à des « danses lascives » lors de soirées privées, ou même à des actes sexuels avec des escortes masculines dans des propriétés appartenant à l’Église. Le journaliste a découvert que de nombreux prêtres étaient des clients assidus des prostitués masculins et transsexuels de Rome.
Un autre membre du clergé avait été filmé à son insu : Mgr Tommaso Stenico. C’était en 2007. Stenico avait alors rencontré un nouveau « partenaire » sur un site de clavardage, à qui il avait affirmé que le sexe gai n’était pas un péché. À un moment donné durant une conversation dans un bar, il avait déposé une main sur la cuisse du jeune homme en lui révélant qu’il le trouvait « hot », pour employer son vocabulaire. La vidéo des échanges avait été diffusée à la télévision italienne.
En 2003, le cardinal Hans Hermann Groër avait été démis de ses fonctions par Jean-Paul II pour inconduite sexuelle présumée avec de jeunes hommes qui lui étaient confiés. En 2005, Juan Carlos Maccarone, l’évêque de Santiago del Estero, en Argentine, avait été contraint de démissionner après que des images où on le voyait engagé dans une activité sexuelle avec un autre homme eurent été publiées.
On s’amuse dans les séminaires
Les séminaires de Rome, où les prédateurs peuvent dénicher de la « chair fraîche », sont des endroits de prédilection pour amateurs de jeux sexuels. Michael Joseph Gross, un journaliste du Vanity Fair, a parlé d’un monseigneur qui se faisait appeler « Jessica » et qui aimait se rendre dans une « école pontificale » pour remettre sa carte professionnelle à des novices dans la vingtaine. La suite, on peut facilement la deviner.
Au cours d’une enquête en 2010 sur la fixation des contrats pour des projets de construction, des écoutes téléphoniques avaient révélé que l’un des gentilshommes de Sa Sainteté, Angelo Balducci, embauchait des prostitués masculins, dont certains étaient de jeunes séminaristes. La nouvelle avait été confirmée par un membre de la chorale vaticane qui avait admis à la police qu’il fournissait des prostitués aux assistants du pape, parmi lesquels Angelo Balduccci.
L’auteur Gianluigi Nuzzi, dans son livre Original Sin, a allégué que des abus sexuels ont été commis dans le pré-séminaire Saint-Pie X, au Vatican. Le livre montre une lettre d’un ancien séminariste gai qui a prétendu que son colocataire, mineur à l’époque, recevait la visite d’un prêtre la nuit pour des rapports homosexuels.
Un professeur de l’International Ecclesiastical College Sedes Sapientiae, où de jeunes hommes de partout dans le monde étudient la prêtrise, a révélé, sous le couvert de l’anonymat, que la vaste majorité des étudiants de cette institution étaient des homosexuels actifs.
Une présence historique
La présence d’homosexuels au Vatican ne date pas d’hier. Le pape Jean XII, qui régna de 955 à 964, fut accusé d’avoir eu des rapports sexuels avec des garçons et d’avoir transformé le palais papal en « bordel ». Le pape Boniface VIII (1294-1303) aurait dit à un apprenti cordonnier, avec qui il voulait faire l’amour, que deux hommes qui entretiennent des relations sexuelles ne commettent pas un péché. Paul II (1464 à 1471) mourut d’une crise cardiaque en faisant l’amour avec un jeune noble, selon une rumeur. Son successeur, Sixte IV, a eu l’un de ses neveux comme amant. Le pape Jules III (1550 à 1555), au moment où il était le cardinal Giovanni Maria del Monte, s’est pris d’affection pour un adolescent du nom d’Innocenzo.
À l’époque moderne, au moins deux papes ont été soupçonnés d’homosexualité : Jean XXIII et Paul VI. Au sujet de ce dernier, l’auteur français Roger Peyrefitte a prétendu que Giovanni Battista Montini avait pris le nom de Paul VI d’après celui d’un ancien amant. Le pape avait dénoncé cette accusation du haut du balcon de la Place Saint-Pierre, la qualifiant d’horrible et de calomnieuse.
Le Ministère New Ways
Les cléricaux LGBT peuvent maintenant compter sur un mouvement qui se porte à leur défense : le New Ways Ministry, qui travaille depuis plus de trente ans à faire accepter les gais et les transgenres au sein de l’Église. Un combat qui n’est cependant pas prêt d’être remporté puisque le mouvement a été condamné précisément par l’Église, entre autres par Joseph Ratzinger, l’ex-pape Benoît XVI, à l’époque où il était à la tête de la Congrégation pour la doctrine de la foi.
Mais le mouvement dispose d’au moins un défenseur de renom, l’évêque à la retraite Thomas Gumbleton, du diocèse de Détroit, qui avait appelé les prêtres et les évêques homosexuels à sortir du placard. En 1995, Gumbleton, lors d’un office religieux, avait porté une mitre sur laquelle figuraient des symboles de la croix, un arc-en-ciel et un triangle rose en signe de solidarité avec la communauté gaie.
Sources
Bilerico Report, Church Militant, Life Site, Newsweek, Reuters, The Guardian, Vanity Fair, Wikipedia